Typologie des charges
Contexte :
Le syndicat des copropriétaires est amené à faire face à plusieurs dépenses afin d'assurer son fonctionnement, dénommées couramment « charges ». De même, il est amené à profiter de produits en sa faveur dès lors où il est en position de vente (ex : vente d'un badge) ou d'une location (ex : location de la toiture pour installation d'une antenne 5G). Les charges sont régies par trois articles de la loi du 10 juillet 1965, à savoir les 10, 11 et 12, qui en définissent les modalités.
Texte légal : Article 10 de la loi du 10 juillet 1965
« Les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipement commun en fonction de l'utilité objective que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot, dès lors que ces charges ne sont pas individualisées.
Ils sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes, générales et spéciales, et de verser au fonds de travaux mentionné à l'article 14-2 la cotisation prévue au même article, proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l'article 5.
Le règlement de copropriété fixe la quote-part afférente à chaque lot dans chacune des catégories de charges et indique les éléments pris en considération, ainsi que la méthode de calcul ayant permis de fixer les quotes-parts de parties communes et la répartition des charges.
Lorsque le règlement de copropriété met à la seule charge de certains copropriétaires les dépenses d'entretien et de fonctionnement entraînées par certains services collectifs ou éléments d'équipements, il peut prévoir que ces copropriétaires prennent seuls part au vote sur les décisions qui concernent ces dépenses. Chacun d'eux dispose d'un nombre de voix proportionnel à sa participation auxdites dépenses. »
Texte légal : Article 11 de la loi du 10 juillet 1965
« Sous réserve des dispositions de l'article 12 ci-dessous, la répartition des charges ne peut être modifiée qu'à l'unanimité des copropriétaires. Toutefois, lorsque des travaux ou des actes d'acquisition ou de disposition sont décidés par l'assemblée générale statuant à la majorité exigée par la loi, la modification de la répartition des charges ainsi rendue nécessaire peut être décidée par l'assemblée générale statuant à la même majorité.
En cas d'aliénation séparée d'une ou plusieurs fractions d'un lot, la répartition des charges entre ces fractions est, lorsqu'elle n'est pas fixée par le règlement de copropriété, soumise à l'approbation de l'assemblée générale statuant à la majorité prévue à l'article 24.
À défaut de décision de l'assemblée générale modifiant les bases de répartition des charges dans les cas prévus aux alinéas précédents, tout copropriétaire pourra saisir le tribunal judiciaire de la situation de l'immeuble à l'effet de faire procéder à la nouvelle répartition rendue nécessaire. »
Texte légal : Article 12 de la loi du 10 juillet 1965
« Dans les cinq ans de la publication du règlement de copropriété au fichier immobilier, chaque propriétaire peut poursuivre en justice la révision de la répartition des charges si la part correspondant à son lot est supérieure de plus d'un quart, ou si la part correspondant à celle d'un autre copropriétaire est inférieure de plus d'un quart, dans l'une ou l'autre des catégories de charges, à celle qui résulterait d'une répartition conforme aux dispositions de l'article 10. Si l'action est reconnue fondée, le tribunal procède à la nouvelle répartition des charges.
Cette action peut également être exercée par le propriétaire d'un lot avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la première mutation à titre onéreux de ce lot intervenue depuis la publication du règlement de copropriété au fichier immobilier. »
Texte légal : Article 1 du décret du 17 mars 1967
« Le règlement de copropriété mentionné par l'article 8 de la loi du 10 juillet 1965 susvisée comporte les stipulations relatives aux objets visés par le premier alinéa du I et par le premier alinéa du II dudit article ainsi que l'état de répartition des charges prévu au troisième alinéa de l'article 10 de ladite loi. Cet état définit les différentes catégories de charges et distingue celles afférentes à la conservation, à l'entretien et à l'administration de l'immeuble, celles relatives au fonctionnement et à l'entretien de chacun des éléments d'équipement communs et celles entraînées par chaque service collectif. L'état de répartition des charges fixe, conformément aux dispositions du troisième alinéa et, s'il y a lieu, du dernier alinéa de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965, la quote-part qui incombe à chaque lot dans chacune des catégories de charges. »
Présentation du cas pratique
Dans le cadre de ce cours sur les annexes comptables, vous prenez connaissance de la résidence LE DOMAINE, composée de 50 lots principaux. Cette résidence est répartie en deux bâtiments de 20 et 30 lots chacun disposant d'un ascenseur.
Un chauffage collectif est présent pour la résidence, ainsi qu'un employé d'immeuble pour assurer les prestations de maintenance et petits travaux de la copropriété.
Cette résidence dispose d'un arrêté comptable au 31 décembre de chaque année.
Vous avez en charge la gestion financière, administrative et comptable de cette résidence. Vous prendrez connaissance des différents postes de charges d'une copropriété, et notamment des modalités d'imputation comptable.
Les charges de copropriété sont réparties en trois catégories distinctes : d'une part, les charges communes générales appelées également charges courantes ; d'autre part, les charges spéciales rattachées à une notion d'utilité du lot ; et enfin, les charges exceptionnelles, c'est-à-dire celles appelées au titre des travaux via un vote en Assemblée Générale.
Charges communes générales
Les charges communes générales sont rattachées à la conservation, l'entretien et l'administration des parties communes de la copropriété. Il s'agit notamment des charges liées à la gestion courante de l'immeuble. Ces dépenses sont assumées par le syndicat des copropriétaires via les appels de fonds effectués par le syndic (voir le module « Effectuer les opérations d'enregistrement des charges et appels de fonds – les charges »).
On distinguera plusieurs typologies de charges prises en compte dans le cadre des charges communes générales, à savoir :
Les charges d'entretien, d'exploitation et de réparation,
Les charges salariales,
Les charges administratives.
Les charges d'entretien, d'exploitation et de réparation
Conformément à l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat des copropriétaires doit pourvoir à la conservation de la copropriété par l'entretien et la réparation des parties communes de l'immeuble.
Texte légal : Article 14 de la loi du 10 juillet 1965
« La collectivité des copropriétaires est constituée en un syndicat qui a la personnalité civile.
Le syndicat peut revêtir la forme d'un syndicat coopératif régi par les dispositions de la présente loi.
Il établit, s'il y a lieu, et modifie le règlement de copropriété.
Il a pour objet la conservation et l'amélioration de l'immeuble ainsi que l'administration des parties communes.
Le syndicat est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires. »
Au titre du budget prévisionnel, seront intégrées les dépenses des « petits » ou « menus » travaux d'entretien qui concerneront les interventions nécessaires à la bonne exploitation de la copropriété.
Ces interventions seront liées au traitement de la vétusté, mais également des événements extérieurs (intempéries, dégradations, etc.).
Exemple :
Pour la résidence LE DOMAINE, le syndic engage une réparation de traitement de fuite sur le réseau d'alimentation d'eau de la copropriété.
Les charges d'entretien des espaces verts
Ces dépenses sont rattachées à l'entretien courant des jardins et parcs des différentes copropriétés. On y recense les dépenses courantes de l'exploitation, mais également des dépenses épisodiques et ponctuelles, comme des opérations d'élagage de traitement des insectes (ex : chenilles processionnaires), des abattages (arbres morts ou arbres engendrant des risques potentiels pour l'immeuble et les occupants). Ces dernières opérations pouvant se retrouver en charges exceptionnelles, étant donné leur coût élevé, il y a donc nécessité d'une décision d'Assemblée Générale pour acter la prise de décision.
Les charges de nettoyage des parties communes
Ces charges peuvent être ventilées soit par bâtiment, soit aux tantièmes en charges communes générales.
Si les prestations sont similaires entre chaque bâtiment, les factures sont généralement imputées en charges communes générales aux tantièmes. Toutefois, suivant la typologie des bâtiments, ces dépenses peuvent être ventilées en charges spéciales.
Exemple :
La résidence LE DOMAINE est ventilée avec un bâtiment de 20 lots et un bâtiment de 30 lots. À cet effet, on suppose qu'un bâtiment est logiquement plus grand que l'autre, la facturation des frais de nettoyage s'en trouvera donc logiquement impactée. De même, la sortie des containers peut également être comptabilisée sur la même logique, 30 lots produisant plus de déchets que 20 lots.
Les charges d'électricité
L'utilisation de l'électricité en tant que fluide d'énergie et la part d'abonnement afférente sont également des dépenses intégrées aux charges communes générales.
Néanmoins, ces dépenses peuvent également faire l'objet de charges spéciales, notamment avec une utilisation spécifique pour l'usage d'un équipement ou encore d'une partie commune desservant exclusivement un bâtiment.
Exemple :
Les copropriétaires du bâtiment A de la résidence LE DOMAINE auront l'électricité des parties communes générales à prendre en charge avec ceux du bâtiment B, mais seront seuls payeurs des services généraux de leur bâtiment et également de leur ascenseur.
Les charges salariales
Le salarié, gardien ou employé d'immeuble, est embauché au profit du syndicat des copropriétaires qui en sera l'employeur, même si les tâches propres à la gestion seront confiées au syndic avec la procédure d'embauche, le licenciement, la retraite, le paiement des salaires et des charges sociales.
Il est à préciser que la Cour de cassation a « tranché » en considérant que les frais des salariés sont des charges relatives à l'entretien, à la conservation et à l'administration des parties. Entendu en tant que tel, les copropriétaires seront dans l'obligation d'y participer à hauteur de leurs tantièmes définis par leurs lots.
L'Assurance Multirisque Immeuble
L'Assurance Multirisque Immeuble a pour objet d'assurer le patrimoine de l'assuré, à savoir le syndicat des copropriétaires. À cet effet, tous les frais liés à l'assurance du bien de l'assuré seront ventilés au nom de la personne morale du syndicat des copropriétaires.
Les honoraires du syndic
Le mandat confié au syndic est réalisé par le syndicat des copropriétaires qui lui confère la mission de gestion administrative, technique et comptable de la copropriété.
Les frais liés à l'exécution de ce mandat seront facturés en charges communes générales. Néanmoins, le syndic étant amené à réaliser des missions ponctuelles sur certaines tâches pouvant être à destination d'un ou plusieurs copropriétaires, elles seront ventilées en conséquence.
Exemple :
En tant que syndic de la résidence LE DOMAINE, vous pourrez être amené à exécuter des travaux spécifiques au bâtiment B : donc les frais de suivi des travaux seront également imputables au bâtiment B.
Exemple :
Les frais de recouvrement à l'encontre d'un copropriétaire débiteur seront imputés sur le copropriétaire indélicat.
Les frais d'Assemblées Générales
L'Assemblée Générale annuelle doit être obligatoirement tenue chaque année pour assurer les modalités de gestion de la résidence, notamment la définition des budgets prévisionnels, l'approbation des comptes ou encore l'exécution de travaux.
Tous les frais inhérents à l'organisation de cette Assemblée Générale sont imputables au syndicat des copropriétaires (frais de réservation de salle, frais postaux, vacations éventuelles du syndic).
Exemple :
Un copropriétaire de la résidence LE DOMAINE, non occupant, habite en Nouvelle-Zélande. Le syndicat des copropriétaires prend en charge le coût de la lettre recommandée avec AR, que celui-ci soit à l'étranger ou en France.
Les impôts et taxes
C'est le syndicat des copropriétaires qui est assujetti aux taxes. À cet effet, il sera redevable de la taxe foncière, de la TVA, mais également potentiellement de la taxe sur les logements vacants, notamment si la loge existante sur la copropriété n'est plus occupée.
Ces frais seront imputés sur la personne morale du syndicat des copropriétaires et seront donc imputés sur l'ensemble des copropriétaires.
Charges spéciales
Contrairement aux charges communes générales qui impactent l'intégralité de la copropriété, les charges spéciales ne concerneront que les lots disposant d'une utilité dans l'équipement ou le service financé par leurs soins.
La répartition de ces charges est prévue par le règlement de copropriété, et plus précisément l’état descriptif de division, qui va préciser les modalités de ventilation des charges spéciales.
Celles-ci sont régies par la notion d'utilité. On retient que le lot est tenu de participer aux charges d'un équipement ou d'un service dès lors qu'il dispose de la possibilité d'en bénéficier.
Remarque :
Si le copropriétaire a le bénéfice de l'utilisation, mais qu'il ne souhaite pas en disposer, il reste néanmoins bénéficiaire : il ne sera donc pas exonéré de cette charge.
Si le lot n'a aucune utilité sur l'équipement, il sera non bénéficiaire et donc non redevable d'une quelconque charge.
On distingue les équipements suivants soumis à la notion d'utilité et donc aux charges spéciales.
La charge Ascenseur
Si le copropriétaire a la possibilité d'utiliser l'ascenseur pour accéder à son lot, il sera contributeur des charges afférentes.
La notion d'utilité sera pondérée de l'usage réel de l'ascenseur. Ainsi, un lot en étage élevé sera impacté sur l'utilisation plus avancée de l'appareil. De même, un lot de grande superficie sera pondéré du fait d'utilisateurs potentiellement plus nombreux.
Suivant les règlements de copropriété, la pondération peut être plus au moins accentuée.
Un résident au RDC pourra se voir imputer des frais de charges du fait d'un accès au sous-sol (ex : l'accès au local vélo ou au local vide-ordures).
La charge Chauffage
Les charges de cet équipement sont également ventilées suivant le critère d'utilité. Principalement, la méthode de répartition utilisée sera celle du prorata de la surface chauffée. Néanmoins, dans le cadre de la loi Grenelle de l'environnement et notamment de l'obligation de comptage des calories consommées, seront ventilées les dépenses sur la surface chauffée, mais également une partie de facturation sur le réel consommé indiqué par le compteur énergétique.
Généralement, est appliqué un ratio de 70 % des frais de combustibles facturés en fonction des consommations individuelles et 30 % en fonction des conditions définies par le règlement de copropriété.
La charge Eau froide
La charge Eau froide peut être ventilée suivant plusieurs solutions :
Soit la copropriété n'a pas de compteurs : dans ce cas, la répartition des charges sera réalisée à hauteur des tantièmes des copropriétaires.
Soit la copropriété bénéficie de compteurs installés par l'opérateur en charge de l'eau et, dans ce cas, la facturation sera effectuée par leurs soins auprès des occupants.
Soit la copropriété bénéficie de sous-compteurs individuels et le syndic sera dans l'obligation d'imputer la ventilation de l'eau consommée auprès de chaque copropriétaire suivant une relève effectuée semestriellement par un prestataire ou par ses soins. Cette dernière solution engendre un coût de location, d'entretien et de relève des compteurs. Dès lors, ce coût est ventilé en part unitaire et les mètres cubes sont ventilés au réel des consommations des copropriétaires.
Exemple :
La copropriété LE DOMAINE consomme 5300 m3 (5000 pour les copropriétaires / 300 pour les services généraux de l'immeuble) pour un coût du m3 de 3,5 €.
Situation 1 : 5300 m3 x 3,5 € = 18 550 € répartis aux tantièmes des charges communes générales.
Situation 2 : 5000 m3 facturés directement par l'opérateur auprès des consommations de chaque résident. 300 m3 facturé au SDC à hauteur de 300 m3 x 3,5 € soit 1750 €.
Situation 3 : 5300 m3 dont 5000 m3 ventilés suivant les consommations des copropriétaires. 300 m3 ventilés en charges communes générales suivant les tantièmes généraux. S'ajoutent des frais de gestion des compteurs (location, entretien, relève) d'environ 40 € / compteur, soit 2000 € qui seront ventilés en part unitaire.
Cette liste est non exhaustive, chaque copropriété pouvant bénéficier d'équipements divers et variés, à savoir :
VMC
Piscine
Portails et porte de garage
Parkings
Charges exceptionnelles
Les charges exceptionnelles sont une combinaison des deux charges citées précédemment, charges communes générales et charges spéciales.
Suivant les travaux exceptionnels décidés et réalisés par la copropriété, ils seront amenés à concerner la totalité de la copropriété et/ou une partie exclusive de la copropriété.
À cet effet, ces charges seront ventilées suivant cette notion d'utilité impactant les copropriétaires utilisateurs.
De même, l'urgence d'une situation ou une utilité fonctionnelle permet au syndic de convoquer une Assemblée Générale indépendamment d'une notion collective. Le syndic pourra tout à fait convoquer une Assemblée Générale spéciale qui concernerait exclusivement un bâtiment, une cage d'escalier ou encore les utilisateurs d'un équipement spécifique (ex : ascenseur).
Dès lors qu'il convoquera une Assemblée Générale spéciale, le syndic utilisera la clé de répartition propre à l'équipement et/ou le service concerné par l'utilisation et le bénéfice de ladite charge.
Exemple :
L'ascenseur du bâtiment A présente une vétusté et il est nécessaire de remplacer les portes palières. Le syndic devra convoquer une Assemblée Générale spéciale avec exclusivement les copropriétaires concernés par la clé de répartition « CHARGES ASC BAT A » en facturant l'intégralité des frais d'Assemblée Générale, de travaux et de suivi sur cette même clé de charges.