Écrire ses émotions

Contexte

De nos jours, la correspondance asynchrone se fait par le biais de la technologie. Fini le temps des correspondances épistolaires qui faisaient vaciller nos émotions entre l'impatience de l'arrivée du facteur et l'ouverture de la lettre. Un moment précieux que chacun pouvait s'accorder, le temps d'une lecture, en écoutant de la musique ou bien assis au coin du feu. L'expéditeur deviendra ensuite le destinataire et se languira de la réponse.

Écrire sur ses émotions a pour but de se libérer d'un poids, de faire réagir l'autre ou encore permet de régler un conflit.

Peu importe le support, correspondre avec une personne à qui nous livrons nos émotions nous amène à utiliser une certaine forme de langage et à structurer notre message afin qu'il soit le plus clair possible.

Nous verrons donc la variété du lexique, des sentiments, ainsi que certaines formes verbales permettant de véhiculer le ressenti d'une personne. Puis dans une seconde partie, nous montrerons que quel que soit le niveau de langue choisi, la structure d'un message reste la même.

Échanger ses émotions par mail

Place au mail et donc et à la technologie. Outre les messages courts par SMS ou sur les réseaux sociaux, les longs échanges peuvent se faire par mail. Par conséquent, l'amour et l'amitié peuvent s'entretenir par mail également.

C'est ce que nous allons découvrir dans l'extrait ci-dessous :

Sacha et Macha sont deux jeunes adolescents qui correspondent par mails depuis que Macha s'est décidée à répondre à Sasha. Celui-ci envoyait des messages à des inconnus dont le nom finissait par un « a » dans l'attente d'une réponse. La lecture de ce roman qui ne reprend que la correspondance entre les deux protagonistes (seuls 10 messages sont échangés entre le père de Sasha et Macha pour les besoins de l'intrigue) illustre le mal-être de l'un (Sacha) qui va trouver de l'aide et du réconfort de la part de l'autre (Macha). Au fil de la lecture, nous découvrons ce qui hante le jeune garçon : ne pas connaître sa mère et faire face à un père meurtri et silencieux. Sa quête pour remonter à ses origines va se faire grâce à la correspondance virtuelle qu'il entretient avec Macha. Les messages seront à la fois tendres et cruels et ainsi chargés d'émotions entre ces deux jeunes mais ils permettront à Sasha de sortir de son silence et de retrouver une vie « normale ».

ExempleDe Sasha à Macha

De : Macha <macha@intercom.fr >

Date : 08 mai

Message :

Sacha, c'est quoi ton plan, là ? Qu'est-ce que tu comptes faire ? Où comptes-tu aller ? Et c'est quoi ce : « Pense à moi » qui me fait si peur soudain, qui me fait froid dans le dos. Sacha, je t'en prie, réponds-moi tout de suite ! Je suis là devant mon ordinateur et j'enrage de ne rien savoir de toi, ni ton nom, ni ton adresse, ni rien, finalement. Je ne sais rien de toi, je ne te connais même pas et tu me fiches une trouille incroyable. C'était idiot notre jeu. Il aurait mieux valu tout nous dire dès le début, ou ne rien commencer du tout ! Je ne sais plus où j'en suis moi. Je me fais un sang d'encre pour un mec que je connais à peine, un ami virtuel qui va sans doute faire une connerie que je ne peux même pas empêcher. Sacha, j'ai peur. Si tu trouves que c'est amusant comme jeu, moi, non. Je ne joue plus. J'ai trop peur. Mais je ne te pardonnerais pas de t'être fichu de moi. J'ai les larmes qui coulent et le cœur qui s'affole. Je déteste la situation dans laquelle je me trouve à cause de toi. Je te déteste, Sacha, de faire ce que tu fais. Allez, sois cool, je t'en prie. Il faut qu'on parle encore. Réfléchis !

Extrait du roman : « De Sasha à Macha », R. Hausfater-Douieb et Y. Hassan, Flamarion 2010 (p72)

Fondamental

Cet extrait souligne la complexité de l'amitié virtuelle. En effet, des informations montrent que les deux personnages ne se connaissent pas vraiment ou du moins dans la vie réelle (mais leur adresse respective souligne un certain lien puisqu'elles ont le même format) :

  • « J'enrage de ne rien savoir de toi, ni ton nom, ni ton adresse, ni rien, finalement »,

  • « Je ne sais rien de toi, je ne te connais même pas »,

  • « Un mec que je connais à peine, un ami virtuel ».

Cependant le ton employé montre une certaine proximité entre les deux correspondants :

  • « Réponds-moi tout de suite ! »

  • « C'est quoi ton plan, là ? Qu'est-ce que tu comptes faire ? Où comptes-tu aller ? »

  • « Allez, sois cool, je t'en prie »

  • « Réfléchis ! »

Ces questions, ordres ou supplication dénotent d'une situation problématique qui fait passer l'expéditeur du message par divers paliers émotionnels.

Des émotions exprimées à proprement parler dans des phrase telles que :

  • « ... qui me fait si peur soudain, qui me fait froid dans le dos »,

  • « J'enrage »,

  • « tu me fiches une trouille incroyable »,

  • « Je ne sais plus où j'en suis moi »,

  • « Je me fais un sang d'encre »,

  • « Sacha, j'ai peur »,

  • « Je ne joue plus. J'ai trop peur »,

  • « J'ai les larmes qui coulent et le cœur qui s'affole »,

  • « Je te déteste, Sacha ».

Par ailleurs le niveau de langue employé de standard à familier montre que les personnages sont amis : « tu me fiches une trouille incroyable ».

Il est clair qu'un message écrit aussi court, retranscrit clairement la situation morale et psychologique de la personne qui le rédige, à travers le ton employé et les émotions transmises.

Outils pour retranscrire son ressenti

MéthodeÉcrire ses émotions à l'écrit nécessite

Le lexique des émotions

Les émotions peuvent être retranscrites par l'utilisation d'adjectifs, de noms, de verbes ou expressions verbales mais aussi par des d'expressions idiomatiques.

OUTILS LINGUISTIQUES

SENTIMENT

La peur

Adjectif

Soucieux, inquiet, préoccupé, stressé, paniqué, angoissé, terrifié, etc.

Exemple : elle est stressée à l'idée qu'il ne lui réponde pas.

Nom

Préoccupation, appréhension, peur, crainte, panique, inquiétude, trac, etc.

Exemple : sa seule préoccupation est de finir son travail à temps.

Verbe ou expression verbale

Craindre, appréhender, redouter, angoisser, avoir peur, etc.

Exemple : il craint de ne pouvoir accéder à sa messagerie avant ce soir.

Expression idiomatique

Avoir la gorge sèche-nouée, avoir le souffle coupé, trembler comme une feuille, claquer des dents, avoir le sang qui se glace-qui ne fait qu'un tour, avoir les jambes en coton, frissonner de peur, être plus mort que vif, etc.

Exemple : je me suis mise à trembler comme une feuille en attendant les résultats.

OUTILS LINGUISTIQUES

SENTIMENT

L'étonnement

Adjectif

Surpris, étonné, médusé, interloqué, stupéfait, estomaqué, troublé, ébahi, etc.

Exemple : je suis médusée d'apprendre que tu t'es marié sans me prévenir.

Nom

Surprise, étonnement, stupéfaction, surprise, stupeur, ébahissement, etc.

Exemple : quand j'ai appris ton mariage, quelle stupéfaction !

Verbe

Interroger, surprendre, déstabiliser, interpeller, dérouter, étonner, etc.

Exemple : cela me surprend que tu acceptes cette situation !

Expression idiomatique

Rester comme deux ronds de flan, rester pantois, ne pas en revenir, avoir les bras qui tombent, avoir le souffle coupé, avoir le sifflet coupé, etc.

Exemple : lorsque j'ai appris la nouvelle, les bras m'en sont tombés !

OUTILS LINGUISTIQUES

SENTIMENT

Le doute

Adjectif

Incertain, indécis, confus, hésitant, équivoque, ambigu, douteux, suspect, etc.

Exemple : ce message que tu m'as envoyé hier était assez équivoque et remet en doute notre relation.

Nom

Doute, incertitude, méfiance, tâtonnement, soupçon, hésitation, défiance, etc.

Exemple : notre relation est basée sur la méfiance.

Verbe

Douter, hésiter, se méfier, présumer, pressentir, soupçonner, etc.

Exemple : il pressent que son avenir dans cette entreprise est incertain.

Expression idiomatique

Faire avaler des couleuvres à quelqu'un, faire prendre des vessies pour des lanternes à quelqu'un, croire ce que l'on voit, ne pas être né de la dernière pluie, etc.

Exemple : il veut me faire avaler des couleuvres quand il m'affirme qu'il a tout fait pour y parvenir.

OUTILS LINGUISTIQUES

SENTIMENT

La joie

Adjectif

Joyeux, satisfait, content, enthousiaste, ravi, enchanté, heureux, etc.

Exemple : nous sommes heureux d'apprendre que tu viens passer quelques semaines ici.

Nom

Satisfaction, joie, gaieté, bonheur, euphorie, ravissement, enchantement, etc.

Exemple : notre rencontre est un véritable ravissement.

Verbe

Prendre plaisir à, rayonner, s'enthousiasmer pour, sourire, rire, etc.

Exemple : nous avons pris beaucoup de plaisir à participer votre meeting.

Expression idiomatique

Sourire jusqu'aux oreilles, sauter de joie, se sentir pousser des ailes, pleurer de joie, heureux comme un poisson dans l'eau, être aux anges, etc.

Exemple : à l'annonce des résultats, elle a sauté de joie.

OUTILS LINGUISTIQUES

SENTIMENT

La tristesse

Adjectif

Malheureux, nostalgique, désespéré, accablé, chagriné, inconsolable, etc.

Exemple : son silence la rendait inconsolable.

Nom

Amertume, chagrin, douleur, affliction, désespoir, mélancolie, regret, peine, etc.

Exemple : elle n'exprime que des regrets face à cette situation.

Verbe

Regretter, déplorer, se lamenter, souffrir, pleurer, se morfondre, etc.

Exemple : ce manque d'empathie de ta part est à déplorer.

Expression idiomatique

Avoir la vague à l'âme, traîner comme une âme en peine, avoir la gorge serrée, être triste comme un bonnet de nuit, avoir le cœur gros, avoir du bleu au cœur, etc.

Exemple : depuis qu'il l'a quitté, elle traîne comme une âme en peine.

OUTILS LINGUISTIQUES

SENTIMENT

L'amour

Adjectif

Amoureux, passionné, exalté, fan (fanatique), ami, etc.

Exemple : elle est amoureuse d'un garçon super sympa !

Nom

Affection, attachement, amitié, tendresse, élan, passion, adoration, engouement, etc.

Exemple : il a beaucoup d'affection pour ses parents.

Verbe

Apprécier, tenir à, aimer, être fou de, chérir, vénérer, raffoler, s'éprendre de, etc.

Exemple : c'est fou comme tu le vénères !

Expression idiomatique

Avoir un cœur d'artichaut, avoir un coup de foudre, vivre d'amour et d'eau fraîche, avoir le béguin, se prendre un râteau, battre la chamade, etc.

Exemple : dès que je l'aperçois, mon cœur bat la chamade.

OUTILS LINGUISTIQUES

SENTIMENT

La colère

Adjectif

Furieux, révolté, outragé, fâché, énervé, mécontent, agacé, etc.

Nom

Colère, rage, furie, agacement, mécontentement, outrage, etc.

Verbe

S'énerver, être en rage, se mettre en colère, se fâcher, s'irriter, s'emporter.

Expression idiomatique

Monter sur ses grands chevaux, piquer une colère, sortir de ses gonds, piquer une colère noir, être rouge de colère, etc.

Les modes de conjugaison

Certains modes de conjugaison permettent de véhiculer des émotions.

L'impératif

Le plus souvent l'impératif permet d'exprimer une injonction (un ordre), mais il peut aussi permettre de faire passer d'autres messages.

Les utilisations de l'impératif :

  • Un ordre : « ferme la porte »

  • Une demande : « passe-moi ton téléphone, stp »

  • Une prière : « Seigneur, bénissez ce repas »

  • Une exigence : « rends-moi ça tout de suite »

  • Une invitation : « passe-demain après-midi »

  • Un conseil : « repose-toi un peu »

  • Une instruction : « tournez la manivelle vers la droite »

  • Un souhait : « amuse-toi bien »

  • Une permission : « ok, vas-y à ton RDV »

  • Une interdiction : « ne fume pas dans la maison »

Remarque

Il est donc nécessaire de se souvenir de la formation de l'impératif présent.

Remarque

L'impératif se conjugue uniquement à trois personnes, mais sans les pronoms :

  • La 2ème personne du singulier : « finis ton exercice ! »,

  • La 1ère personne du pluriel : « allons-y »,

  • La 2ème personne du pluriel : « partez ! ».

Il n'est guère différent de la conjugaison du présent de l'indicatif, mais sans le « s » à la fin à la 2ème personne du singulier des verbes du 1er groupe : « mange ».

Les auxiliaires « être » et « avoir », se forment sur la base du subjonctif présent.

D'autres verbes ont des spécificités comme « savoir » et « vouloir », (voir tableaux ci-dessous).

MéthodeLe subjonctif présent ou passé

Ce mode est employé dans les complétives pour exprimer des émotions :

  • Subjonctif présent :

    « Je suis triste que tu ne viennes pas à mon anniversaire ».

  • Subjonctif passé :

    « Nous sommes heureux que vous ayez apprécié notre petite fête ».

Il est donc nécessaire de connaître la formation du subjonctif.

Les terminaisons sont les suivantes : e-es-e-ions-iez-ent.

Les verbes réguliers se forment à partir du radical du verbe conjugué à la 1ère personne du pluriel au présent de l'indicatif, cependant de nombreux verbes irréguliers peuvent prendre un radical ou deux radicaux différents.

Les auxiliaires « avoir » et « être » permettent d'employé le subjonctif passé.

Le sujet de la proposition principale ne peut être le même que celui de la complétive. Dans ce cas on utilise la forme infinitive du 2ème verbe :

« Je suis heureuse de savoir que tu vas bien ».

Pour mieux comprendre, ajoutez devant chaque verbe « il faut que », exemple : il faut que nous parlions.