Mobilité professionnelle initiée par l'entreprise

Contexte

Le principe de mobilité interne consiste pour une entreprise à puiser dans ses propres ressources pour répondre aux besoins opérationnels et/ou aux perspectives de développement stratégiques de l'entreprise. Elle peut concerner tout type de changement : structure, région, pays, fonction ou métier.

Nous allons étudier ici de plus près les modalités de mise en place de cette mobilité. Longtemps à l'initiative des entreprises, et parfois crainte quand elle est imposée, elle est aujourd'hui de plus en plus demandée par les collaborateurs eux-mêmes qui se veulent être acteur de leur parcours professionnel (plus particulièrement la catégorie cadre). En effet, interrogés par l'Apec au printemps 2019, 64 % des cadres déclarent vouloir réaliser une mobilité dans les 3 ans à venir.

Nous allons voir que les entreprises ont tout intérêt à favoriser cette démarche, qu'elle s'inscrit pleinement dans leur politique RH, même si, en fonction du contexte économique, il n'est pas toujours possible de laisser cette initiative au collaborateur.

Mobilité imposée, proposée ou demandée : quelles sont les différences et les enjeux ? Comment les accompagner ?

Lorsque la mobilité est à l'initiative de l'employeur, celle-ci peut prendre 2 formes : soit elle est imposée, soit elle est proposée au(x) collaborateur(s).

Voici quelques chiffres :

  • 31 % des salariés du privé âgés de 30 à 60 ans ont été confrontés à une mobilité professionnelle à l'initiative de leur entreprise au cours des 5 dernières années.

  • 13 % ont été contraints à la mobilité, 13 % ont accepté une proposition qui leur a été faite alors que 5 % l'ont refusée. (Étude TNS Sofres, 2019).

Mobilité imposée, dans certaines circonstances nécessaires

La mobilité imposée, appelée également mobilité obligatoire, contrainte ou orientée est souvent la conséquence d'une situation économique particulière : transfert d'activité, réorganisation de l'entreprise, rachat ou fusion, suppression de poste, rupture du contrat de travail, etc.

Exemple

Stéphane est ingénieur pédagogique chez Formaod au sein de leur antenne sur Brest.

Malheureusement les résultats financiers ne sont pas au rendez-vous et la société se retrouve contrainte de fermer cette antenne d'ici quelques mois. L'entreprise cherche à reclasser la majorité des collaborateurs de l'antenne sur d'autres sites de la même région. Stéphane, qui dispose d'une clause de mobilité (!), est donc informé qu'il sera muté d'ici 3 mois à Quimper sur un emploi similaire.

Dans cette situation vous pouvez constater que le collaborateur n'a pas le choix, la mobilité s'impose à lui.

Unilatérale, la mobilité imposée peut avoir des conséquences psychologiques non négligeables. Elle est souvent perçue comme une épée de Damoclès par les salariés, particulièrement ceux qui sont en CDI et qui ont signé une clause de mobilité géographique.

Lorsqu'elle est mise en place elle peut être vécue comme un stress intense car l'employé ne maîtrise pas ce qui lui arrive. C'est pourquoi il est important de privilégier au maximum le dialogue avant/pendant et après la mutation.

Conseil

Il est important de prendre un temps pour discuter avec le collaborateur de cette mobilité imposée. En fonction de la configuration de l'entreprise c'est le service RH ou le manager qui va s'en charger.

Ce sera l'occasion de lui expliquer ce qui a amené l'entreprise à prendre une telle décision, de lui exposer les éventuelles opportunités que cela peut représenter pour lui et le rassurer si nécessaire.

Le salarié pourra de son côté expliquer son point de vue, évoquer ses craintes, les problématiques qu'il peut rencontrer... Dans ce cas vous pourrez anticiper ses freins et l'accompagner au mieux vers sa nouvelle prise de poste. En se sentant compris, même s'il n'aura pas le choix, le salarié pourra davantage rester motivé et engagé dans l'entreprise. En donnant du sens à sa mobilité les freins psychologiques seront moins importants.

Exemple

Dans le cas de Stéphane, le service RH l'a reçu en entretien pour l'informer de la décision de mutation de Brest à Quimper avant de lui envoyer le courrier officialisant cette décision.

Le contexte économique a été expliqué ainsi que le processus de reclassement. Cette mobilité a été présentée comme une opportunité pour Stéphane de découvrir un nouveau secteur et de développer de nouvelles compétences car ses nouvelles missions seront légèrement différentes.

Stéphane a pu à cette occasion faire part de ses craintes liées aux trajets, son nouveau lieu de travail étant à 1h de route du précédent. Le service RH a pu en tenir compte et lui a proposé, après accord de la direction de l'entreprise, de faire 2 jours de télétravail par semaine. Cette solution a permis à chacun de trouver son compte dans cette nouvelle organisation et à Stéphane de vivre cette mutation plus sereinement.

Conseil

Même en cas de mutation imposée il est important de privilégier le dialogue. Écouter ne veut pas dire abonder dans le sens du salarié mais lui permettre de s'exprimer et éventuellement de désamorcer certaines réticences. L'entreprise y a tout à gagner en termes d'image et de coûts économiques directs ou indirects (contentieux, arrêts maladies répétés, conflits internes, etc.).

Les mobilités imposées sont néanmoins plutôt limitées et ne représentent que 13 % du total des mobilités (source TNS Sofres, 2019).

Mobilité proposée, un levier d'adaptabilité

L'employeur identifie qu'un collaborateur pourrait évoluer et/ou répondre à un besoin sur un autre poste que celui qu'il occupe actuellement. Il lui est donc proposé de pourvoir cet emploi. Le collaborateur a la possibilité d'accepter ou de refuser.

Exemple

Guillaume, Chargé de communication interne de l'entreprise Formaod, s'est vu proposer le poste de Community Manager qui répondait à un nouveau besoin au sein du service Communication. Il était en mesure de refuser cette évolution de poste et dans ce cas ce poste aurait pu être pourvu en interne en identifiant un autre collaborateur de l'entreprise ou en externe.

La mobilité professionnelle proposée par l'entreprise peut se faire dans différentes circonstances, cela est majoritairement le cas dans le cadre d'une opportunité professionnelle ou la réorganisation de l'entreprise qui génère la création de nouveaux postes.

Attention

La communication va être ici aussi primordiale et va contribuer à l'aboutissement ou l'avortement de ce projet.

Présentée de manière maladroite ou sans tenir compte des éventuels souhaits d'évolutions que le collaborateur aurait formulé, il pourrait avoir le sentiment d'être simplement « utilisé » pour répondre aux impératifs de l'entreprise. Alors qu'à l'inverse une proposition de mobilité peut être valorisable auprès d'un employé : l'entreprise aide son collaborateur à développer ses compétences et à le faire évoluer au sein de l'entreprise. C'est un gage de confiance qu'on lui accorde. Il sera de ce fait plus enclin à accepter la proposition et sera plus motivé et engagé dans son activité.

Remarque

74 % des propositions de mobilité aboutissent ! Lorsqu'elles n'aboutissent pas c'est avant tout parce que les salariés les refusent.

D'où une fois de plus l'importance de prendre du temps avec le collaborateur pour lui expliquer le poste, les raisons qui amènent l'entreprise à le lui proposer, l'accompagnement qui pourra lui être proposé pour qu'il réussisse dans ses nouvelles fonctions, etc. Et bien entendu l'écouter pour identifier ses éventuelles craintes, adapter dans la mesure du possible les conditions, etc.

Attention

Rappelons ici que les salariés peuvent refuser, sous certaines conditions, la mise en œuvre de la clause de mutation géographique imposée de manière unilatérale par l'employeur même s'ils l'ont acceptée par avance, au moment de la signature de leur contrat de travail.

L'employeur ne peut, d'une manière générale, imposer à un salarié une mutation qu'à condition de ne pas commettre d'abus, par exemple imposer une mutation loin du lieu de résidence pour pousser le collaborateur à démissionner ou à refuser la mobilité et ainsi le licencier pour faute grave. Dans ce cas les tribunaux compétents pourraient considérer le licenciement comme abusif et condamner l'entreprise à la réintégration du collaborateur et à des dommages et intérêts. La bonne foi de l'employeur va être vérifiée sur la véracité des conditions économiques, des besoins, etc. et sur les efforts qu'il aurait consentis pour aider le collaborateur dans sa mobilité.